J'ai demandé au flic de garde comment il était, le commissaire.
"Pas du genre à passer l'éponge sur tes conneries, sale môme" qu'il m'a répondu.
Ouais, mais ça m'aide pas ça. Connard va.
J'ai eu envie de lui cracher à la gueule. J'l'ai fait. J'suis comme ça moi. Spontané. Sur l'échelle de la spontatitude j'suis là-haut, tout là-haut.
C'est p't'être pour ça que je me retrouve dans cette cellule d'ailleurs. Et qu'accesoirement, le gros poulet qui s'est reçu mon mollard sur les chaussures est en train de me coller une rouste. Faudrait qu'il apprenne à se détendre du slip. Ah. Merde. Ça fait mal. J'vois plus rien. Faudrait que je me défende non ? Mais. Ça risquerai d'aggraver mon cas. J'espère que ça va vite se terminer.
A un moment, je crois qu'un de ses collègues a débarqué pour la relève et l'a arrêté. En tout cas, quelqu'un est intervenu, a gueulé un truc et m'a remis sur mes pieds. Le gros lui, il a disparu après ça.
Le sol il est plus palpable.
J'me suis assis sur la banquette pourrie en me tenant le crâne. Paye ta migraine pour les trois jours à venir. J'crois que j'ai eu un blanc, que j'ai buggué une minute. Ou deux. Ou trois. J'sais pas trop. Mais j'ai reprit mes esprits quand une serviette humide s'est matérialisée devant mon pif. ne serviette soutenue pour un bras, lui-même accroché à un corps. Un type à peine plus agé que moi avec un visage un peu niais. Un newbi, ça s'voyait. L'ira pas bien loin lui, s'il reste gentillet comme ça.
Le gars s'est assis à coté de moi pendant que j'm'enfoncais le visage dans la serviette - bordel ça fait du bien - et il m'a dit que l'autre type tait d'jà à moitié sur la sellette, que c'était un abruti complet, violent et désobéissant, ce genre de trucs. J'm'en foutais pas mal à vrai dire. Puis il m'a demandé ce que j'avais foutu pour mettre le gros lard en rogne comme ça.

"J'voulais juste savoir quel type de mec c'était, votre commissaire. Parait que c'est lui qui va m'interroger demain"

J'ai p't'être éludé le coup du mollard pour ma propre sécurité.

"Et c'est pour ça qu'il s'est mis à te confondre avec une pinata ?"
"Mh."

Me regarde pas avec ces grands yeux étonnés. On élude j'ai dit.

"T'as envie de savoir ce qui t'attends c'est ça ?"

C'est ça. Évidement que c'est ça. P'tit malin. J'ai un pote qui s'est fait chopper pour un petit vol à la con une fois. Trois fois rien. Il en a prit pour plusieurs années juste parce que le flic chargé de l'affaire n'aimait pas sa gueule - façon de parler - et a incriminé les preuves en conséquence. A force d'entendre ce genre de trucs, ça fout un peu la blase quand tu te fais toi-même coffrer.

"Ba, t'en fais pas trop va. Si tu coopères avec lui, t'auras pas trop de soucis. C'est un chic type."
"C'pas c'que votre collègue a laissé sous-entendre."
"Ah ? Hm. Et bien, je suppose que si tu t'obstines à faire la tête brulée et que tu joues les gros durs devant lui, tu risques de te prendre un sermon ou deux. C'est qu'il est pas mal paternaliste sur les bords. Il a tendance à voir tout ses cadets comme des gamins qu'il doit remettre dans le droit chemin tu vois ? Moi-même, j'ai eu droit à une ou deux taloches."

Oh, arrête, tu vas m'faire pleurer.

"Quoiqu'il en soit, t'auras quand même du mal à l'énerver. Je ne l'ai presque jamais entendu hurler. Il a pas mal de sang-froid. Ou alors c'est un type calme au quotidien ? Je ne peux pas vraiment dire. C'est une des qualités qui fait qu'il est devenu commissaire je suppose. Il a une bonne capacité de jugement et il sait rester impartial - parfois un peu trop. Mais au moins, il est honnête et franc. C'est difficile à trouver de nos jours."
'Quoi, les flics pas véreux ? Tu m'éto-..."
"Les humains pas véreux."
"..."
"Enfin. Le cherche pas trop quand même, le connaissant, tu risques de le regretter. Parce que ça lui arrive pas souvent, mais quand il gueule, il gueule. Et vaut mieux pas être dans le coin, crois-moi."
"Ouf. Pendant un instant, j'ai cru qu'on parlait de Mère Thérèsa."
"Ahah, non, on en est loin. Je veux dire, ça reste un policier pas vrai ? J'ai toujours pensé qu'il fallait être pas très net pour vouloir faire un tel métier."

Wow. Wow wow wow. Si on m'avait dit un jour que j'entendrais un poulet me dire ça.

"...C'pour ça que vous êtes devenu flic aussi ?"
"Surement !"

..Urg. Mec, t'es gentil, la prochaine fois, ton clin d'œil, tu te le garde.

"J'vous pige vraiment pas."
"C'est peut-être pas plus mal. Bon" Le v'la qui se relève. "La pause a assez duré. Je vais envoyer un autre garde."

Et pouf. A pu. Fini. Comme ça. Bon, en même temps, j'me doutais qu'il allait pas me faire la bise non plus.
A vrai dire, j'pourrais prendre le temps de cogiter sur tout ce qu'il m'a dit, mais à cause de l'autre couillon j'ai quand même une sacré migraine. Et j'ai sommeil bordel. Sacrément sommeil. On devrait plus venir me faire chier maintenant. J'crois que je vais dormir... Juste un peu.


Si le concerné avait entendu toute cette conversation, il aurait surement soupiré un coup. Non pas qu'il n'était pas fier de la loyauté que lui portait ses hommes, au contraire, mais il y a toujours une grande différence entre la façon dont on se voit, et celle dont les autres nous perçoivent. David, c'est un type qui ne comprend pas trop l'estime qu'on lui porte, mais qui ne la refuse pas pour autant. C'est un type qui bosse beaucoup, sans en avoir l'air. C'est un type qui gagnerait à arrêter d'être aussi amer et désabusé, un type qui semble cool et classe au premier abord, mais qui vit trop de cynisme et de désillusions au quotidien pour être vraiment heureux. C'est un type un peu trop nostalgique, qui vit trop dans le passé pour se satisfaire du présent. En somme, David, c'est juste un homme qui tente de faire de son mieux alors qu'il préférerait arrêter de se lever le matin. Juste un humain parmi d'autres.

Ici, tu vas causer pendant minimum 8 lignes. Eh ouais. C'est pas beaucoup, t'as vu. On est trop cool, par ici.

Ici, tu vas causer pendant minimum 10 lignes. Eh ouais. C'est pas beaucoup, t'as vu. On est trop cool, par ici.

Pseudo : Sea
Comment t'as trouvé SsM ? Sous une chaussette sale.
Un dernier mot ? Je suis faible.